Réparer et entretenir son vélo soi-meme
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Watts (et/)ou Cx ? De 0 a 70 km/h en velo sur le plat, sans assistance

Régulièrement, on voit arriver sur ce forum des amateurs qui ont découvert avec bonheur vélo ou VAE - on les comprend -, et qui, préoccupés par la longueur du trajet caractéristique auxquels ils sont confrontés - typiquement domicile - travail -, lancent un questionnement pour savoir de quel ensemble batterie/moteur à faire exploser les records de Watts embarquables ils pourraient s'équiper, avec des ambitions tout à fait louables : 45, 50 km/h de moyenne, 80, 100, 120 km à faire tous les jours.
Et là, très vite, on rentre doucement dans le pur délire, car on passe de l'amateurisme au sens de : « caractéristique de celui qui aime », à l'amateurisme au sens de :
« caractéristique de la perte du sens des réalités », en opposition au professionnel qui connaît les limites inévitables auxquelles les ambitions énoncées vont vite se confronter.
Alors, en raisonnant sainement, voyons ce qu'il est possible de faire, et avouons d'entrée que la possibilité « jeu sur le nombre de Watts embarqués » est extrêmement limitée sur ce sujet, lorsqu'on examine cette question dans notre première approche en I :

I - Bilan des forces en présence



Le vélo, c'est d'abord la plus noble conquête du mollet humain, et ceci nous ramène à un point de vue non pas terre à terre, mais pas élevé quand-même, à savoir qu'il n'a d'abord été question que de la seule force musculaire pour propulser un vélo. Et dans ce domaine, même si, énergétiquement, on estime qu'il est 5 fois plus efficace que la marche à pied, avouons que nos performances physiques ne sont pas stratosphériques.

En effet, en cyclotourisme, selon, âge, entraînement, intensité du trajet etc., on considère que la puissance de pédalage d'un individu varie dans une fourchette de 1 à 3 W par kg de sa masse corporelle ; autrement dit, que l'on soit une gentille gazelle de 60 kg, ou un gros balaise de 90 kg en pleine force de l'âge, on comptera respectivement sur 180 W ou 270 W tout au plus pour se propulser en permanence sur un trajet cycliste de quelques km à rythme de course contre la montre, qui, dans ces conditions, nous verra en nage au point d'arrivée, joues bien rouges, et coeur au-delà des 80/85 pulsations/minutes.

Par comparaison, sachez que les plus grands sportifs au sprint, dont les scientifiques nous confirment qu'ils ne fonctionnent pas qu'à la vitamine de pur jus de fruits pour en arriver là, développent alors jusqu'à 500 W dans cette épreuve.
Et toujours par comparaison, voyons ce que des outils de transport standard nous offrent, ce qui va nous permettre de relativiser nos performances. Commençons par la plus repérable, la voiture, « l'ennemie », diront certains.
Aujourd'hui, il est courant de disposer sur nos véhicules d'une puissance de 100 000 W, ou 100 KW si vous préférez.

A 133 km/h, vitesse que l'indulgence de réglage de radar permet sur autoroute, sans vent et à vitesse stabilisée, on peut considérer qu'une bonne voiture tourne à 40% de sa puissance totale, soit 40 000 W tout de même pour soutenir cette vitesse. Retenez ces chiffres, ils ne sont pas anodins, et nous allons y revenir.
Un scooter 125 cc urbain capable de 115 km/h en pointe sur autoroute, c'est ainsi 11 000 W de puissance maxi, et un scooter de moins de 50 cc, vous savez, les plus petits dont le bruit vrille les oreilles, et pilotés légalement sans permis par des moins de 18 ans, proposent entre 2 200 et 3 000 W de puissance maxi, soit 1 500 à 2 500 W aux 45 km/h maxi légaux.

Donc, rien qu'à ces énoncés, avec un rapport de puissance de l'ordre de 1 pour nous cyclistes, contre 15 pour le plus modeste des scooters, on comprend intuitivement que, pour aller vite ou à forte moyenne, un problème de manque de force va vite se poser à nous.
Bien, mais, de toutes manières, si rien ne s'opposait à notre propulsion, nos vélos accélèreraient sans cesse, et nous atteindrions ainsi des vitesses infinies. Alors, où est le vrai problème des résistances à notre avancement ?
Pour faire simple, il y en a de deux ordres.

1/ Le premier ordre, globalement, relève d'une résistance au roulement, dans laquelle, par facilité de compréhension, nous cumulerons résistance de roulage essentiellement due au comportement des pneus sur le sol, et résistance de la transmission.
Donnons de suite des ordres de grandeur pour chacune, sachant qu'elle varie peu avec la vitesse, disons pour faire simple que deux pneus correctement gonflés vont nous absorber 25 W de puissance par échauffement, en s'aplatissant, puis reprenant leur forme, lors de leur passage sur la surface de contact au sol.

Quant à une transmission, elle va nous perdre, toujours par frottements, donc en dissipant un peu de chaleur, de l'ordre de 5 à 7% de la puissance impulsée au pédalier, donc là aussi, on voit qu'il n'y pas de quoi fouetter un chat, mais tout de même de quoi se préoccuper d'une lubrification efficace de sa chaîne de transmission, le cas échéant, pour maintenir le pourcentage de perte dans des valeurs pas trop nuisibles (vivent les carters de chaîne intégraux !).

A présent que nous avons dégrossi le problème de la résistance globale au roulement d'un cycliste, observons en un en situation réelle, de 1,75 m et 75 kg. Sur son vélo de ville, bien entretenu, il pédale, le sommet de sa tête à 1,80 m du sol, et s'il roule pépère à seulement 73 W de puissance développée, et bien, la pratique nous montre qu'il atteint sur le plat, sans vent, sur bonne surface bitumée, les 18 km/h, point, barre ! Et maintenant, mes chers lecteurs, je vais faire appel à votre propre mémoire.

En vous défonçant sur vos vélos bien réglés et bien entretenus, sur même surface, par cette même météo de vent nul, en vous penchant sur vos cintres, combien atteignez-vous en vitesse de pointe, avec vos 180 à 300 W ? 35, 38, 43 km/h pour les plus doués ?
Le Varna Diablo II couché intégralement caréné du record mondial de vitesse à vélo de plus de 133 km/h Et pourtant, un jeune canadien, en 2009, avec 2 roues presque comme les nôtres, des pédales, un guidon, une chaîne de transmission entraînant la roue avant, bref, monté sur un vélo, a atteint tout seul, sans moteur ou assistance, ou bolide qui l'aspirait, une vitesse de 133,284 km/h très exactement, sur 200 m lancé, record du monde dans ce domaine.

Et pour cela, pouvait-il faire appel aux 40 000 W de la voiture de tout à l'heure, à vitesse identique ? Bien sûr que non, il développait alors juste 450 à 500 W au pédalage, comme M. tout le monde jeune, bien taillé, motivé et ultra sportif. Alors, quel était son secret ? Et bien, c'est que son vélo, le Varna Diablo II, était entièrement caréné et profilé ; et c'est tout !

Alors, conclusions provisoires :
La différence entre le dit Sam Wittingham sur son vélo, et nous sur les nôtres, c'est la bagatelle de + 90 km/h en vitesse de pointe. Ce qui veut dire que la marge d'augmentation de vitesse de pointe ou de vitesse moyenne, soit + 220 %, marge pour laquelle certains viennent mendier sur ce forum pour leurs projets vélos, se trouve d'abord et avant tout dans le profilage de notre ensemble pilote + machine, et non dans l'embarquement de moteurs d'assistance à puissance délirante, avec des batteries à voltage dangereux dépassant allègrement les 48 V.

Une deuxième raison de bon sens milite aussi pour cela : l'industrie du vélo est faite pour produire des machines calculées pour supporter des puissances de propulsion ne dépassant guère les 500 W, sur 100 000 km de durée de vie.

Et, à ce sujet, interrogeons-nous :
Avez-vous déjà vu des motos à tubes de cadre de quelques centimètres de diamètre ?
Avez-vous déjà vu des scooters à freins à patins V brake ?
Avez-vous déjà vu des mobylettes à chaîne de transmission de 2,3 mm de large ?
Avez-vous déjà vu des voitures à pneus de 6 cm de large, grand maximum ?
Avez-vous déjà vu des roues à rayons minces sur de gros 2 roues ?

Bien sûr que non, car ce sont tous des composants pour bicyclette, conçus pour résister à de très faibles forces mécaniques. Même pour équiper un simple tandem, à cause de la petite capacité de résistance des boîtes de vitesses pour vélo, le choix est très limité. Alors, ne délirons pas avec nos rêves de puissance d'assistance fabuleuse, sinon, ça cassera ici et là.
Donc, à l'opposé, concentrons-nous sur l'énoncé suivant qui passera à la postérité sous le nom de théorème de lum (on cherche une rue disponible pour pose de plaque), rabâchez-le sans cesse, et retenez donc, une bonne fois pour toute, que : « tout ensemble vélo standard + cycliste est un désastre aérodynamique roulant. »

2/ Et, deuxième conclusion provisoire, il est temps à présent de se pencher sur l'autre ordre de résistance à l'avancement du vélo, le plus puissant dès qu'on prend de la vitesse, et de loin, à savoir, comme vous le devinez, l'aérodynamique.

II Aérodynamique et vélo, le possible et le raisonnable



Posons d'emblée les fondamentaux de cette question ; d'abord, l'air. Il est pour nous un faux ami. Il suffit de rouler avec un bon vent de face pour vite s'en apercevoir. L'air est en fait très lourd : 1,2 kg au m3. En photo aérienne basse altitude, sachez par exemple qu'un petit dirigeable à hélium de seulement 6 m3 vous soulève allègrement de l'ordre de 4 kg de charge utile supplémentaire. Donc, remuer de l'air, c'est en fait remuer en permanence une grosse charge, et c'est considérablement énergivore.
Et pour remuer un minimum d'air avec un mobile, il y a deux moyens :

- Se faire tout petit ; traduction cycliste, diminuer la surface frontale que l'on oppose au vent de la vitesse. Reprenons le cas du cycliste de 1,75 m sur son vélo droit. Les deux représentent une surface frontale opposée à l'air - on parle de maître-couple en aérodynamique, dénommé S - de 0,56 m2. Et bien, faisons rouler le dit cycliste non pas sur un engin de record totalement délirant, et même pas sur un maximaliste vélomobile. Un brave vélo semi-couché suffit amplement à nous faire faire d'immenses progrès en notre matière, car sur un Easy Racer 26 x 26 de route que chacun pourrait très facilement adopter, la surface frontale du même ensemble pilote + vélo passera à 0,27 m2 seulement. Pour vous en traduire le bénéfice, sachez que vous aurez alors diminué votre puissance de pédalage requise pour tenir les 40 km/h, de l'ordre de 0,27/0,56 x 85% = - 41 %. Réduite d'une petite moitié ! Pas mal, non, pour commencer ?

- Caresser l'air au lieu de le remuer, ce qu'en aérodynamique, on nomme profiler, à savoir diminuer les rugosités des surfaces de frottement avec l'air, et l'empêcher de tourbillonner autour et derrière vous et votre vélo, afin d'augmenter le coefficient de pénétration dans l'air, le fameux Cx. Semi-couché américain Tour Easy standard, proche de l Easy Racer, avec bouclier aérodynamique avant du commerce. Vous voulez encore du mieux pour pas très cher ? Vous équiperez l'avant de votre semi-couché d'un bouclier aérodynamique. Sur mon semi-couché, j'ai gagné 3 km/h de vitesse mesurée en pointe, sur une base de près de 40 km/h. A cette vitesse, cela représente encore une économie de puissance de propulsion de l'ordre de 18 %. Si j'applique cette mesure aux données précédentes, je conclue que mon Perceval VI semi-couché à bouclier aérodynamique est donc (41% x 0,82 = 33,6 %) pas loin de deux tiers moins freiné par l'air à 40 km/h qu'un vélo droit de ville (à modérer par le fait que l'Easy Racer de référence est un peu plus « couché » que mon vélo). Ensuite, tout est sujet à carénage, pour grappiller encore 5%, 10% ici ou là : les roues, les fourches, les dérailleurs, la zone de fuite derrière le dos du pilote, un pare-brise à monter devant la tête et le haut du buste etc. Vous avez déjà examiné un garde-boue standard sur vélo, avec son profil caractéristique de parachute déployé contre le vent de votre vitesse ? Vous croyez que cela donne quoi, comme frein à votre pédalage ? Mettez-moi vite votre ensemble roue + fourche sous jupe de type train d'atterrissage d'avion de tourisme. Mais n'oubliez jamais : l'efficacité aérodynamique tient à la diminution du résultat du produit du maître-couple par le coefficient de pénétration dans l'air, cet ensemble mesurant le SCx du mobile. Pensez donc toujours et d'abord « diminution de la surface frontale » ; plus vous serez couché et bas sur votre vélo, mieux ce sera.

Achevons notre tour d'horizon du profilage pour constater des performances mesurées sur un engin dont on peut s'inspirer, sans nécessairement avoir du transformer son salon en tunnel à vent pour test ad'hoc. Prototype Laüfer de semi-couché énergétiquement performant à carrosserie Le Laüfer dont je vous joins la photo, qui n'est qu'un semi-couché 26 x 20 spécifique, à carrosserie semi-ouverte, mais théoriquement handicapé par un maître couple significatif, puisque son toit passe au-dessus de la tête du pilote, tenait les 40 km/h avec...150 W de puissance de propulsion appliquée.

Donc, cher lecteur, si vous êtes le gros balaise de 90 kg comme énoncé plus haut, avec vos 270 W de puissance musculaire-crête, le domaine des 50 km/h en pointe sur semi-couché bien personnalisé dans son profilage est à votre portée, sans avoir pour autant rajouté le moindre W d'assistance électrique sur votre vélo.

Une chose peut à juste titre vous frapper dans ces énoncés, c'est la modestie du gain de vitesse, comparée aux grosses améliorations de profilage mises en face. Cela tient à une règle implacable de la science de l'air, qui annonce que le travail pour vaincre sa résistance augmente avec le cube de l'augmentation de vitesse. Ainsi, passer de 40 à 50 km/h (+ 25 %) implique de déployer 125% x 125% x 125% = env 195% de puissance en plus, près du double, pour contrebalancer cette seule résistance-là. Toujours à partir de 40 km/h et à vélo, les autres résistances deviennent négligeables, de l'ordre de 15 % à la dite vitesse, c'est pourquoi la nécessité de profilage peut difficilement être ignorée à partir de 30 km/h, et devient un impératif catégorique à partir de 40 km/h.

Car, si l'on applique ces ratios au vélo standard, et constatant que pour conserver 40 km/h, il faut environ 280 W de puissance appliquée, le travail à réaliser va vite flamber pour faire monter l'aiguille du compteur de vitesse si l'on ne le modifie pas : 510 W pour 50 km/h, 870 W pour 60 km/h, et 1370 W pour 70 km/h. Ce qui montre bien qu'une logique de puissance sans cesse croissante sans aérodynamisation pour gagner en vitesse de croisière à bicyclette devient rapidement insoutenable.

III Vitesse, SCx et vélo : les années à venir



Alors, en conséquence, quelles sont les évolutions de l'architecture vélo de la décennie à venir, face à ces constations ?
Et bien, tout d'abord, tout plaide en faveur du développement du semi-couché, pas seulement parce qu'il offre un maître-couple réduit ; mais aussi parce qu'il va diminuer la hauteur de la tête du pilote, pour la ramener au niveau, ou légèrement au-dessus, de celle du conducteur de voiture, conservant au vélo son adaptation aux conditions de visibilité dans le trafic au voisinage de voitures. Et en plus, en apportant un confort d'assise qui réintègre le vélo standard à l'âge de la planche de bois roulante qu'il n'a en fait jamais quitté.

Et parce que le handicap de poids d'une carrosserie sur vélo peut être compensé par une assistance électrique, cet habillage verra forcément le jour. Surtout que, lorsqu'on aura mis une carrosserie devant et en partie autour de son vélo, il faudra être complètement c...n pour ne pas aller au bout de la démarche : rajouter un toit, et se protéger de la pluie. Et là, je vois l'oeil de mes lecteurs vélotafeurs briller d'un surcroît d'éclat tout à fait révélateur.

Au passage, je souligne encore une supériorité de l'architecture semi-couché dans cette perspective, c'est la diminution de la prise au vent latéral offerte : gare à celui qui se hasarderait sur vélo standard à carénage conséquent par temps de bourrasques de vent.
Donc, pas sûr que ces nouveaux vélos ne séduisent pas d'abord les utilisateurs pour leur confort ; on pourrait les baptiser du mot-valise évocateur « cyclotoit » pour les désigner.

Néanmoins, je pense que l'on peut effectivement compter sur 50 km/h comme domaine de leur performance en vitesse de pointe, et 36 à 42 km/h pour celui de leur vitesse moyenne, contre respectivement 40 km/h et 26/33 km/h pour les actuels VTCAE rapides ; bien entendu, ceci n'est envisageable qu'avec des assistances sous régime administratif de mobylette, avec coupure à 45 km/h, dans une gamme de puissance comprise entre 300 et 450 W nominaux pour rester supportable.
Et cela, sur châssis que des roues de diamètre 24" a minima porteront à 2,35 m de long au moins. Aérodynamique aidant puissamment, je pense que la consommation batterie n'augmentera pas significativement pour autant, et que 36 V 12 à 15 Ah pourraient rester la norme d'équipement de ces nouveaux VAE.

Pour la suite, rêvons, mais je suis sûr que des progrès à base de lourds développements portant sur la pénétration dans ll'air des carrosseries, et qu'une chasse ambitieuse aux cm2 superflus de leur maître-couple rendront ces vélos aptes à approcher d'ici 10/15 ans, toujours sur le plat et sans vent, la barrière des 70 km/h en pédalage sans assistance.


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Créé le 24-01-2013 à 13h20.
Modifié le 24-01-2013 à 21h06.

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